Mes enfants ne sont pas des IA – #4 Ils racontent tous les deux des histoires.

Mes enfants ne sont pas des IA – #4 Ils racontent tous les deux des histoires.

Tuesday, November 28, 2023 EnfantsIA

Pour ce 4ème article de la série, j'ai testé la créativité de mon enfant et celle de ChatGPT. A votre avis, qui raconte les plus belles histoires?

Mon garçon de 5 ans adore les histoires. Nous lui lisons des livres tous les jours depuis qu’il est tout petit, il écoute sa conteuse à histoires pendant des heures et il joue sans cesse avec ses amis imaginaires, dans un univers fantastique qu’il a inventé pour sa clique. Parfois, je participe également, j’amène des idées et je joue le rôle de personnages dans ses histoires. Un soir, il s'est mis à inventer des arbres fantastiques, comme des ketchupiers, des fritiers ou des dentiers. Ce dernier l'a tellement fait rire qu'il a commencé à raconter une histoire à propose de bébés qui viennent cueillir leurs dents sur ces arbres. Il s’est probablement inspiré de son petit frère qui venait tout juste d’avoir ses premières dents. L'histoire n'était pas très élaborée et complètement absurde, mais je l'ai trouvée originale et assez drôle. Alors je me suis dit : « Mon fils est un génie ! Il a tellement d'imagination ! L’IA ne pourra jamais être aussi créative que lui, n’est-ce pas?

Pour en avoir le cœur net, j'ai décidé de demander à ChatGPT de créer une histoire à propos les dents qui poussent sur les arbres. En quelques secondes, ChatGPT m'a généré une histoire d’une cinquantaine de lignes, pleine de magie, bien structurée, extrêmement bien écrite avec des personnages et des lieux fantastiques. J'ai été assez surprise. Que restera-t-il à cette génération à créer si l’IA peut écrire de belles histoires en quelques secondes ? Puis, j'ai regardé à nouveau et plus attentivement l'histoire de ChatGPT. Il s’agissait de choses inhabituelles qui poussent sur les arbres, mais le fait qu’il s’agisse de dents n’était pas vraiment pertinent. Alors, j'ai demandé à ChatGPT de créer une histoire avec des arbre à ballons et à chaises. Les noms des personnages fantastiques et des lieux étaient différents (la forêt ne s'appelait pas Grinwood mais Baloonia ou Chairwood), mais les histoires étaient quasi identiques. Puis, quand j'ai parlé à mon fils de ballonniers et de chaisiers, j'ai obtenu 2 autres histoires, peut-être pas bien structurées, pas avec de jolis mots, mais elles avaient le mérite d'être originales et différentes l'une de l'autre.

L’IA générative n’a pas vocation à innover, même si cela semble être le cas à première vue. Il crée le contenu le plus probable dans un contexte défini en fonction des milliards de données auxquelles il a été exposé. Et ça fonctionne! L’IA d’aujourd’hui peut créer quelque chose de nouveau, pas original, pas toujours génial, mais néanmoins quelque chose qui n’existait pas tel quel au départ. C'est ainsi qu'il peut raconter des histoires, mais aussi créer de la musique, des œuvres d'art et même des recettes de cuisine comme ces petits biscuits(en français) ou ces applications qui vous aident à cuisiner un repas avec ce qu’il reste dans votre réfrigérateur. Une grande partie de ce que nous créons s’inspire de ce que nous avons déjà écouté, vu ou goûté, et il en va de même pour l’IA.

Et si nous, les humains, arrêtions de créer nous-mêmes de nouvelles choses et laissions l’IA le faire à notre place ? Notre culture va certainement stagner, se standardiser et nous finirons par lire, écouter et goûter de plus en plus la même chose. Des études ont été menées pour tenter de prévoir ce qui se passerait si l’on laissait l’IA s’entrainer de plus en plus sur des données synthétiques, c’est-à-dire de données générées par l’IA. C’est ce qui va certainement se produire avec l’IA générative entraînée à partir de données extraites d’Internet dans les prochaines années, car le contenu d’Internet est de plus en plus alimenté par l’IA – Vous vous souvenez de mon premier article ? 90 % d'Internet sera généré par l'IA d'ici 2030. Cet article de Futurismexplique comment l'IA générative devient MAD (Model Autophagy Disorder) après 5 itérations d'entraînement avec des données synthétiques. L'auteure, Maggie Harrison, explique :

« Lors d'un entraînement répété sur du contenu synthétique, disent les chercheurs, les informations marginales et moins représentées à la périphérie des données d'entraînement d'un modèle commenceront à disparaître. Le modèle commencera alors à s’appuyer sur des données de plus en plus convergentes et moins variées, et par conséquent, il commencera bientôt à s’effondrer sur lui-même. »

Alors, je continue d'encourager mon fils à raconter des histoires fictives absurdes, à chanter faux et à jouer des chansons étranges, à dessiner des images colorées et singulières, à cuisiner ses propres mélanges épicés-amers-doux-salés-aigre-doux à la limite do comestible et bien plus encore pour le laisser exprimer sa créativité. Car, plus que jamais dans l’histoire de l’humanité, cette génération devra faire preuve de créativité, sortir des sentiers battus, oser expérimenter et tester de nouvelles choses. En combinant la créativité humaine avec la capacité de l’IA à structurer, formuler, concevoir ou assembler, les humains n’ont jamais eu autant d’opportunités de s’épanouir et de créer quelque chose de beau.

No comments yet
Search