Mes enfants ne sont pas des IA – #1- ils devront simplement vivre avec.

Lorsque ChatGPT a été lancé en novembre 2022, j'étais enceinte de 7 mois. J'étais occupée à diriger une équipe chargée de la protection des données dans une grande banque mondiale, à planifier mon départ en congé maternité, à préparer Noël et, bien sûr, à fabriquer un petit être humain. Je m'intéressais déjà à l'IA depuis quelques mois. J'avais suivi des cours, lu des articles et pris contact avec des experts dans le domaine. Pourtant, je suis passée complètement à côté du buzz lié au lancement de ChatGPT, car mon attention était entièrement focalisée sur ma famille… jusqu’à ce que le Parlement Européen adopte la loi sur l’IA (the EU AI Act) en juin 2023, la première étape de sa promulgation. J'ai recommencé à lire des articles et j'ai pris conscience de tout ce qui s'était passé dans ce domaine pendant que j'étais dans ma petite bulle. Mais j'ai aussi réalisé que cette période loin de ces préoccupations était aussi une occasion de prendre du recul et de réfléchir à la manière dont l'intelligence humaine se développe sous mes yeux, avec mon bébé et mon petit garçon alors âgé de 4 ans.

Je ne peux pas vraiment m'attribuer le mérite d'avoir fabriqué ma propre «intelligence naturelle». Cependant, lorsque j'élève mes enfants, j'influence leurs premières expériences, je leur explique comment les choses fonctionnent et en ce que je crois, j'essaie d'inculquer de la morale dans leurs décisions. En résumé, j’assume ma part de responsabilité dans la construction du monde de demain. Dans une certaine mesure, les développeurs d’IA font la même chose et assument des responsabilités similaires : ils sélectionnent et nettoient les données qui seront injectés, ils testent et ajustent le code, et ils sont responsables des résultats et de leurs conséquences. Certains jours, une anecdote avec l'un de mes garçons fait tilt. Cela me fait penser à la manière dont l’IA pourrait être améliorée, à comment mieux élever mes enfants ou à les préparer au mieux au monde de demain.

Le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui évolue à un rythme effréné et, en tant que parent, il est très difficile de savoir comment préparer au mieux nos enfants. Personne ne sait vraiment à quoi le monde ressemblera dans 10 ou 20 ans avec le changement climatique, l’instabilité géopolitique, le développement du métaverse, etc. Certains scénarios sont même trop effrayants pour oser y penser. Ce qui est sûr, c’est que le développement rapide de l’IA va radicalement changer la façon dont nous travaillons, la façon dont nous interagissons avec la société, la façon dont nous vivons et dont nous profitons de la vie.

A titre d’exemple, les experts prévoient que d’ici 2030, 90 % du contenu d'Internet aura été généré par de l’IA. Que nous considérions que c’est une bonne chose ou non n’a pas vraiment d’importance. Nos enfants y seront exposés dès leur plus jeune âge et auront accès à l’IA générative avant même de pouvoir rédiger un texte de 500 mots. Comment trier toutes ces informations, comment distinguer le vrai du faux, le bien du mal, comment développer leur esprit critique, comment continuer à penser comme des êtres humains alors que tout autour de nous n’est qu’algorithmes et probabilités ? Nos enfants devront s’adapter à ce monde et développer leurs propres compétences, pour trouver leur place dans la société et s’épanouir en tant qu’êtres humains.

Pour faire court, c’est ainsi que m’est venue l’idée de cette série d’articles. Je voulais partager mes réflexions, réconciliant ces 2 sujets qui me passionnent et qui occupent la plupart de mon temps et de mes réflexions ces derniers temps : la parentalité et l’éthique de l’IA. Je ne prétends pas être un expert technique en IA, ni un neuroscientifique ; mes idées seront donc basées sur des observations empiriques partielles et partiales, en me référant à des articles ou opinions d'experts. Je ferai de mon mieux pour apporter mon humble contribution à la grande réflexion de ce siècle sur l’IA et l’humanité.